Concrétisation d’Une Vie Des Histoires

[…]  Le travail et la persévérance finissant toujours par être gratifiants, c’est en avril 2015 qu’Une Vie Des Histoires  signe enfin son premier contrat,

Florence : «notre cible, qui initialement était les séniors, a vraiment évoluée. Bien évidemment elle est très intéressante mais nous en avons identifié d’autres. Et c’est avec notre premier client que nous avons mis en place la formule Regards Croisés, cette histoire était autour d’un mariage.»

Anita : «nous n’avions pas eu cette idée au départ et notre premier livre nous a permis de compléter notre offre. D’ailleurs, c’est probablement l’idée la plus originale qui nous différencie le plus de nos concurrents, puisque finalement nous nous rendons compte que notre concept est à la mode, même s’il peut être traité différemment. Mais Regards Croisés c’est en plein dans nos compétences, confronter des points de vue, enrichir une histoire. C’est sympa d’avoir sur le même évènement des regards qui se croisent, qui apportent des éclairages différents, des émotions différentes.»

C’est évidemment ravie mais non sans émotion et sans stress que l’équipe d’Une Vie Des Histoires se lance dans la réalisation de leur premier livre,

Laurence : « il y a eu une super pression, c’était le premier, il fallait être sûrs d’assurer. A la fois nous avions tous confiance mais nous avions peur aussi. Notre client Roland y compris, il engageait ses copains. Mais cela a été très bénéfique pour nous ce premier livre, très fondateur, sans ça nous aurions peut-être arrêté. C’est certain, nous avons eu du stress en terme de dates, de mise en page à refaire à la dernière minute, l’imprimeur qui ne répondait pas, c’était une horreur mais en même temps un moment de bonheur».

Sébastien : «ce premier livre, cela a été une satisfaction de concrétiser, c’est un événement qui dit que nous avons réussi à vendre notre concept. Mais heureusement que nous n’en avons pas vendu 10 à ce moment là, ça a été plus long que ce qu’on pensait, pas la rédaction, mais la version numérique, les bandes audio, l’impression… nous avons avancé sans filet en fait. Mais cela nous a permis d’affiner plein de choses donc c’est positif.»

Un enthousiasme et un stress ressentis par l’ensemble de l’équipe mais sans aucun doute un vécu différent pour Preciosa,

Preciosa : «au départ j’étais très stressée, comme d’habitude, je fonctionne comme ça, mais là pour le coup un stress énorme. Ce n’était pas qu’une histoire, il s’agissait d’un Regards Croisés avec 8 personnes ! Je me suis dit que c’était quelque chose d’énorme surtout pour un premier contrat, une première expérience pour Une Vie Des Histoires.

Mais j’étais ravie en même temps, notre concept intéresse ! Et puis l’idée était super sympa, Roland qui voulait offrir à la future épouse de son ami un livre qui le raconte à plusieurs étapes de sa vie, une idée très originale. Suite aux enseignements des pilotes, j’ai donc fait les entretiens préalables afin de construire les guides d’entretiens et j’ai mené les premiers avec Nathalie, une chargée d’études qui travaille en free-lance pour Quadema. Elle m’a beaucoup aidée, m’a rassurée, et elle aussi était très enthousiaste vis-à-vis de notre concept. Ensuite plus à l’aise, j’ai continué les entretiens seule. Mais lorsque nous avons fait les premiers, nous nous sommes demandées ce qu’on allait en faire ! L’impression que rien de percutant ne ressortait. Tout ça m’inquiétait vraiment, j’avais un certain poids sur les épaules, c’est moi qui rédigeais, il fallait que j’assure, j’avais la responsabilité du produit final.

Mais je crois que je m’en suis bien sortie. Finalement, j’ai rencontré des gens très intéressants, très émouvants, qui sont arrivés à transmettre des choses incroyables, il y avait beaucoup d’humanité et de vraies amitiés. J’ai vraiment fait de superbes rencontres, des personnes très sympathiques et pleines d’émotion, je suis contente de les avoir rencontrées. Au final une superbe expérience au niveau des rencontres mais aussi au niveau de la restitution des récits. Je me suis régalée. Moi j’ai besoin que les choses se posent, il me faut un peu de temps, et c’est sûrement ce qui s’est passé lors des premiers entretiens je pense, une fois que je les ai vus à l’écrit, que j’ai pris un peu de recul, là c’est devenu limpide.»

Rôle de chacun des associés au sein d’UVDH

[…]  Au delà d’une gestion commune, Anita et Florence décrivent ainsi le rôle de chacun au sein d’Une Vie Des Histoires,

Florence : « nous avons demandé à Laurence de devenir responsable du projet, il fallait quelqu’un de fonceur comme elle, quelqu’un avec autant d’énergie pour prendre le projet à bras le corps. Et effectivement c’est elle la gérante, elle porte vraiment le projet.

Preciosa est parfaite à la production, elle réalise les entretiens et rédige.

Sébastien lui, il connait plein de trucs au niveau informatique, internet. Il a une compétence très utile pour développer Une Vie Des Histoires via les réseaux sociaux, ces choses là que nous connaissons un peu moins bien. Et au delà de cet aspect, son regard sur la rentabilité est important.

Anita : «Florence et moi nous sommes au développement de la méthodologie et venons en appui à la production. Ce que nous imaginons dans l’avenir c’est participer à la production et continuer à codiriger Une Vie Des Histoires bien évidemment. Mais nous poursuivons en parallèle notre activité chez Quadema que nous aimons bien.

Rôle qui est confirmé par Laurence et Preciosa,

Laurence : «dans le groupe je suis un peu le moteur je pense, quelles que soient les situations j’ai envie qu’on avance et la difficulté aujourd’hui c’est de se faire connaitre. Il faut beaucoup d’énergie, toutes les semaines je rencontre des gens à qui je parle d’Une Vie Des Histoires. J’ai été nommée gérante mais cela ne change rien à ma manière de contribuer. Ce n’est pas ça qui fait que je donne plus ou moins, mais j’apprécie qu’on m’ait fait confiance pour me nommer gérante.»

Preciosa : «dès le départ mon rôle était d’être à la production, mener les interviews et restituer le récit à l’écrit. Je ne suis pas une entrepreneuse, le budget et le commercial ce n’est pas mon truc. Avec l’expérience chez Quadema, Florence et Anita ont bien constaté que conduire des entretiens et rédiger c’était en effet dans mes cordes.»

Mais un positionnement moins évident pour Sébastien,

Sébastien : «je ne suis pas sûr d’avoir un rôle particulier, nous faisons tous avancer Une Vie Des Histoires. Souvent j’ai l’impression d’être l’empêcheur de tourner en rond avec mon coté pragmatique ! J’aime bien me faire l’avocat du diable, mais je pense que c’est important, cela permet de confronter les idées et de se poser des questions. Mais mon rôle est rien et tout, je n’ai pas un rôle attitré et en plus je ne saurais pas lequel prendre au delà de dépanner en informatique. Aujourd’hui on confronte nos idées, on partage et c’est très riche pour moi. J’ai toujours travaillé un peu seul, je n’aime pas les conflits, je les évite et travailler seul règle ce problème. Aussi travailler en équipe au sein d’Une Vie Des Histoires est très enrichissant, cela me permet de sortir de ma zone de confort et cela me fait avancer au niveau humain. Quand on est tout seul il n’y a pas besoin de se justifier, on fait ses propres choix, là cela me demande des efforts, communiquer, expliquer et ne pas en faire qu’à ma tête. C’est un mode de fonctionnement qui n’était pas le mien, cela me fait grandir finalement… et en plus je suis le seul garçon dans cette équipe !»

Création d’Une Vie Des Histoires

[…] Après cette première rencontre, les associés réfléchissent à la façon de concrétiser le projet,

Florence : «nous avons commencé à nous réunir de manière plus ou moins régulière pour voir comment on pouvait avancer sur le projet, le mettre en place. Beaucoup de choses étaient en suspens, il fallait affiner notre offre, définir la cible, qui a pas mal bougé depuis d’ailleurs, les points techniques comme l’entretien, la retranscription du récit, …»

Laurence : «chacun partait avec quelque chose à faire, des objectifs. Sébastien avait en charge le site internet, Anita, Florence et Preciosa plutôt la méthodologie et puis moi j’étais plus la business développement, comment ancrer Une Vie Des Histoires dans une réalité business en fait.»

Anita : «nous avons mis dans le circuit notre expert comptable pour formaliser les choses et nous avons abouti à la création d’une filiale de Quadema. D’ailleurs au début ça ne s’appelait pas Une Vie Des Histoires mais Histoires de Vies. Ce nom étant pris, nous avons travaillé ensemble pour trouver un nouveau nom. Les statuts ont été rédigés et la société officiellement créée.»

Leurs réflexions les amènent par ailleurs à réaliser des pilotes avant de se lancer concrètement dans la commercialisation de leur produit,

Florence : «avant la création officielle, Preciosa a fait des pilotes, des entretiens test. Cela a permis d’ajuster le rendu, la narration, à ajuster plein de choses. Entre les réunions de groupe avec les séniors et les pilotes il ne c’était pas passé grand chose de ce coté là et, avoir l’idée c’est bien, mais il faut quand même tester les choses, les affiner. Nous avons donc affiné la technique d’entretien, le rendu aussi, nous avons tâtonné jusqu’à trouver la bonne façon de faire.»

Laurence : «il y a eu des hauts et des bas, l’expérience des pilotes était plutôt un bas d’ailleurs. Nous pensions que ce serait facile de trouver des personnes qui veuillent faire ça, mais non en fait. Nous voulions aussi nous servir des pilotes pour agrémenter notre site internet, mais ce que nous racontent les gens c’est très personnel et un souci de confidentialité s’impose, ce n’est donc pas possible. Nous nous sommes vraiment posés des questions, est-ce qu’on continue ou pas ?»

Preciosa : «dans notre esprit au départ, ce qui est complètement aberrant aujourd’hui, le schéma était le suivant : on contacte les gens qui veulent raconter une histoire, on prend rendez-vous, on va faire l’entretien avec un enregistreur à la main et les gens racontent. Nous avons donc fait les pilotes comme ça, sans filet. On se disait que les gens racontent ce qu’ils ont envie de raconter, poser des questions cela semblait envahissant. Mais bien évidemment il y a un travail préparatoire avant l’entretien, il faut savoir ce qu’ils veulent raconter, pour qui, pourquoi, jusqu’où ils souhaitent aller, c’est très important tout ça. C’est à partir de là qu’on peut construire le guide d’entretien et creuser les émotions, les sentiments. Et puis les pilotes nous ont également permis d’ajuster la restitution du récit, de donner plus d’importance au récit brut original.»

 

 

Emergence du concept Une Vie Des Histoires

[…] Tout en gardant à l’esprit cette idée qui les séduit tant, l’activité au sein de Quadema suit son cours et Anita fait un voyage professionnel à New-York.

Elle y rencontre Laurence avec qui elle évoque ses envies de changement et la réflexion qui chemine depuis qu’elle a vu sa tante,

« c’est pendant notre balade à Central Park qu’elle me raconte ce qu’elle avait en tête, elle cherchait une façon de compléter l’activité de Quadema et me parle donc de son idée. C’était de retranscrire des moments importants des gens, en prenant l’exemple de sa tante, en disant que quelques fois on passe à coté de choses parce que nous ne sommes pas suffisamment attentifs et qu’il y a certainement quelque chose à faire. Ce qu’elle me racontait me parlait vraiment, je la rejoignais tout à fait dans son discours, j’ai trouvé l’idée vraiment géniale. »

L’idée d’Anita séduit beaucoup Laurence et au delà de l’intérêt humain, elle y voit également une activité à déployer,

« nous avons donc brainstormé autour de ça parce que le partage, le coté humain c’est important pour moi aussi. Et j’ai eu tout de suite la vision que ça pouvait être quelque chose de grand. J’ai beaucoup fait rire Anita d’ailleurs en disant qu’on pouvait vendre ça dans une box ! Oui je voyais tout de suite comment ça allait pouvoir se transformer, faire du business aussi. Faire que ce ne soit pas simplement quelque chose de ponctuel, mais que ce soit une vraie aventure d’entrepreneurs. Du coup Anita me dit : si tu y crois à ce point je vais creuser ! »

Anita rentre donc de New-York avec un projet un peu plus précis mais là encore il y a une petite phase de latence avant d’aller plus loin. Puis petit à petit, un concept prend forme,

« tout de suite Laurence a réagi en terme de business. Avec Florence nous avons beaucoup moins cette facette là. On voyait bien l’intérêt pour nous, pour les personnes qu’on pourrait rencontrer, la dimension humaine. Mais la dimension business nous échappait un peu… et donc quand je suis rentrée avec cette idée écrite cela a eu le mérite de poser les choses, de les ancrer. Nous nous sommes dit qu’il fallait qu’on le fasse sérieusement et comme notre métier c’est de faire des études, nous avons décidé quelque temps plus tard de faire une étude pour nous afin de valider le concept. »

Anita et Florence se mettent dans la peau de leurs clients et réalisent une étude qualitative afin de mesurer l’intérêt que pourrait susciter ce concept,

« nous avons décidé de monter une étude de A à Z pour répondre à notre question. Sachant que la cible à laquelle nous avons tout de suite pensé était les séniors, puisque l’idée est née d’une rencontre entre Anita et sa tante. Des gens qui ont peut être le plus gros de leur vie derrière eux mais qui ont plein de choses à raconter et qui auraient peut être envie de laisser une trace, que les enfants ou petits enfants apprennent l’histoire de la famille. C’est comme ça que nous avons choisi notre cible. Nous avons été jusqu’à écrire un projet avec nos objectifs. Nous avons formalisé l’idée pour en faire un concept disons plus marketing, pouvoir soumettre cette idée rédigée dans des termes facilement compréhensibles et nous avons demandé à notre partenaire de recruter des femmes âgées de plus de 60 ans, assez dynamiques et impliquées dans la vie sociale. »

C’est ainsi qu’Anita et Florence animent deux groupes de séniors qui accueillent plutôt bien leur idée.

L’attrait du concept ne fait aucun doute mais ne sachant pas trop comment avancer, les choses restent en l’état pendant quelques mois…

Une Vie Des Histoires – Genèse

Lors des vacances d’été Anita se rend chez sa famille et rend visite à sa tante Gina,

« pendant un été je suis allée dans ma famille et notamment j’ai vu ma tante, qui est d’ailleurs décédée depuis. Je voulais passer du temps avec elle, je ne l’avais quasiment jamais fait avant, elle vivait toute seule et n’était pas très en forme. Je lui ai dit : on va sortir tes photos et on va parler de tes souvenirs. Elle s’est prêtée au jeu avec plaisir, c’était pour elle un moment très sympa je pense, et pour moi aussi !
Je me suis retrouvée avec des photos de gens de ma famille que je ne connaissais pas, une époque qui me paraissait très ancienne. Ma tante a retracé les liens et les histoires de famille. Du coup tous ces gens qui étaient sur des photos noir et blanc ça prenait vie, l’histoire familiale ressortait à travers son discours. »

Les vacances s’achèvent, elle repart avec de très bons souvenirs mais aussi avec une idée en tête… les regrets viendront plus tard,

« dans cette période où l’on se posait pas mal de questions sur ce qu’on pourrait faire, un jour j’évoque avec Florence le fait que ça pourrait être sympa de faire avec des gens ce que j’ai fait avec ma tante et de le retranscrire, même si moi je n’ai rien gardé. Parce que finalement rencontrer des gens, les interroger c’est notre métier. »

[…] « Cela m’a bouleversée à l’époque, sur le moment j’avais conscience que j’avais vécu avec elle un moment rare mais en fait le regret que j’ai est venu plus tard. Sur le moment j’en n’avais pas conscience, je n’avais pas l’idée d’inscrire ce moment là, j’ai juste eu conscience que je vivais un moment spécial avec elle, ça oui. Cela a déclenché tout le raisonnement dont on a parlé, mais par contre ce regret c’est quelque chose qui est venu avec le temps, quand j’ai vu se formaliser Une Vie Des Histoires et que j’ai pris conscience finalement que j’avais perdu ce moment là. Cela a été un moment, même s’il a duré plusieurs heures, qui a été fugace et plus le temps passe plus mon souvenir s’estompe, je l’ai perdu à tout jamais ce moment. Ça a tenu à pas grand chose, il aurait fallu que j’ai un enregistreur et qu’après on fasse ce travail de mémoire, mais bon le temps a passé et je n’ai plus que le regret de ne pas l’avoir fait, ma tante est décédée depuis et c’est fini. Mais si avec cette idée on peut permettre à des personnes de ne pas vivre la frustration que je vis aujourd’hui – parce que je suis sûre qu’il y a plein de gens qui probablement auraient aimé fixer quelque chose de leur histoire – si on peut permettre de le faire, pour moi c’est bien au delà d’une question de business. En tout cas pour moi c’est une motivation forte. »